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BuSCA n°136 - 26 juin 2025
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Éditorial
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Le bulletin de cette quinzaine rapporte plusieurs évènements sanitaires en cours dont des cas graves de SHU en France actuellement sous investigation. Une étude européenne sur la détection de Toxoplasma gondii et une nouvelle méthode de spéciation de l'arsenic développée en France illustrent l'importance des avancées analytiques pour une meilleure surveillance des contaminants dans les aliments. Bonne lecture !
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Évènement
France, SHU, viande
Depuis le 12 juin 2025, 22 enfants âgés de 1 à 12 ans et une personne âgée ont été pris en charge au service des urgences de Saint-Quentin (Aisne) pour symptomatologie digestive sévère ; neuf d’entre eux ont développé un SHU dont l’un est décédé. Les premiers éléments de l’enquête ont mis en évidence la consommation de viande chez tous les enfants, cependant ils ne fréquentent pas tous les mêmes collectivités et leurs familles s’approvisionnent dans des commerces différents. Des investigations sont en cours afin d’identifier l’origine de la contamination ; quatre boucheries et deux rayons boucherie de supermarchés ont été fermés de manière préventive. Lien En lien avec l’épidémie, les produits carnés tels que les merguez, saucisses et viandes d’agneau d’un distributeur localisé à Saint-Quentin ont fait l’objet d’un rappel publié le 23 juin. Lien
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Évènement
États-Unis, Salmonella Enteritidis, œufs
Aux États-Unis, une épidémie à Salmonella Enteritidis est en cours dans sept États avec 79 cas signalés entre février et mai 2025. La majorité des cas interrogés ont rapporté la consommation d’œufs achetés auprès de divers magasins avant l’apparition des symptômes ; la souche épidémique a été isolée dans des échantillons d’œufs prélevés chez un fournisseur commun. Ce dernier a procédé au rappel des œufs le 6 juin.D’après des analyses WGS, la souche épidémique présente une résistance à l’acide nalidixique et à la ciprofloxacine. Lien En 2024, le système américain de surveillance de la résistance aux antimicrobiens (NARMS) a alerté les autorités sur l’émergence de souches de S. Enteritidis (isolées de cas humains, de poulets vendus au détail ou prélevés à l’abattoir) présentant une sensibilité réduite à la ciprofloxacine. Lien
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Évènement
États-Unis (cas), Turquie (source), Salmonella Oranienburg, crème de pistaches
Aux États-Unis, de la crème de pistaches importée de Turquie est à l’origine de quatre cas d’intoxication à Salmonella Oranienburg. Les cas ont été recensés dans deux États, entre mars et mai 2025. Les produits incriminés indiquent une date limite de consommation en octobre 2026. Des investigations sont en cours afin d’identifier d’éventuels lots supplémentaires contaminés. Lien
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Étude
Europe, Toxoplasma gondii, salades prêtes à manger
A ce jour, il n’existe pas de surveillance européenne obligatoire des parasites dans les produits frais et les méthodes d’analyse ne sont pas harmonisées entre laboratoires. Dans ce contexte, une étude a été menée auprès de dix pays européens, dont la France, afin d’estimer la prévalence de Toxoplasma gondii dans des salades prêtes à manger (mélanges de jeunes pousses et salades pré-coupées), par PCR en temps réel, validée par des essais inter-laboratoires. Au total, 3 293 échantillons ont été collectés au stade de la distribution en 2021 et 2022. T. gondii a été détecté dans 4,1 % des produits. Les proportions d’échantillons les plus contaminés ont été observées au Royaume-Uni (16 %) et en France (6,1 %). Les échantillons prélevés en hiver (janvier-mars) présentaient le taux de contamination le plus élevé. Ces variations saisonnières pourraient s’expliquer par des différences géographiques d’approvisionnement, cependant peu d’étiquettes d’emballage mentionnaient l’origine des produits empêchant toute analyse approfondie. Lien
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Étude
Chine, Listeria monocytogenes, viandes cuites
Une étude menée en Chine a estimé la contamination par Listeria monocytogenes des viandes cuites à partir des données de surveillance officielle de 2021. L’échantillonnage couvrait 31 provinces et incluait différents types de préparation (viandes fermentées, fumées, grillées, marinées, etc.) de différentes espèces animales (porc, poulet, bœuf, canard principalement), vendues au détail. Les résultats indiquent la contamination de 1,64 % (88/5 361) des échantillons avec une fréquence de contamination significativement plus élevée pour les produits vendus à la découpe (1,98 %) en comparaison des produits pré-emballés (0,61 %). Pour les produits pré-emballés, les auteurs identifient la contamination initiale de la viande crue comme un facteur de risque important ; des estimations précédentes en Chine ont fait état d’une contamination de la viande crue par L. monocytogenes comprise entre 8,7 et 11,7 %. Lien
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Étude
Monde, norovirus, eaux destinées à la consommation humaine
Les norovirus sont les principaux agents responsables de gastro-entérite virale et l'eau potable peut être un vecteur de leur transmission. Les données de 76 études, menées principalement en Asie et en Europe, ont été incluses dans une méta-analyse afin d’évaluer la présence des norovirus dans les sources d'eau potable et l'eau potable elle-même. Les résultats ont montré une contamination de 15 % des échantillons d’eaux de surface ou souterraines et 6 % des échantillons d'eaux de distribution ou embouteillées. Au total, la proportion d’échantillons contaminés par des norovirus du génogroupe II (7 %) était significativement plus élevée que celle d’échantillons contaminés par le génogroupe I (4 %). Aucune différence significative n'a été observée entre les saisons. Lien
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Bilan
Canada, dangers microbiologiques, denrées alimentaires
Dans le cadre du Programme national de surveillance microbiologique, l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) a réalisé 12 447 analyses sur 5 216 denrées alimentaires prélevées entre avril 2022 et mars 2023. Les taux de conformité s’élevaient à 98,7 % pour les produits canadiens et 98,5 % pour les produits importés. Au total, 32 produits se sont révélés non conformes dont douze produits de la mer, principalement des huîtres contaminées par Vibrio parahaemolyticus. En parallèle, 1 699 analyses ont été menées sur 1 432 échantillons prélevés dans l’environnement de production d’établissements canadiens, avec un taux de conformité de 97,5 %. Seize échantillons ont été jugés non conformes en raison de la détection de Listeria monocytogenes. Lien
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Bilan
États-Unis, épidémies d’origine alimentaire, surveillance
Aux États-Unis, le réseau CORE (Coordinated Outbreak Response & Evaluation) sert de point focal pour la coordination des interventions, l'évaluation des épidémies d'origine alimentaire et la mise en place d'actions de prévention. Le réseau collabore avec les CDC, les bureaux locaux de la FDA et les agences d’État. En 2023, il a évalué 25 incidents liés à des produits alimentaires. Au total, dix avis de santé publique ont été émis et huit rappels de produits ont été effectués. Le bilan met en évidence quelques évènements sanitaires notables dont des intoxications liées à la consommation de morilles insuffisamment cuites, problématique nouvelle pour la FDA. Lien Les informations relatives aux enquêtes épidémiologiques menées par le réseau CORE sont accessibles au public. Lien
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Étude
Allemagne, allergènes, insectes
Une étude en Allemagne a mis au point un protocole de caractérisation des protéines allergisantes appliqué à six insectes comestibles autorisés dans l’UE : Acheta domesticus, Locusta migratoria, Tenebrio molitor, Alphitobius diaperinus, Gryllodes sigillatus et Hermetia illucens. Pour la plupart de ces espèces, les bases de données protéiques ne recensent qu’un faible nombre de protéines connues. En recherchant des homologies entre les séquences peptidiques extraites de ces insectes et l’ensemble des protéines décrites chez les arthropodes, les auteurs ont pu identifier jusqu’à 24 fois plus de protéines pour certaines espèces. Ainsi, entre 1 079 et 1 893 protéines ont été identifiées par espèce et parmi elles, 62 à 106 correspondaient à des allergènes putatifs, suggérant un potentiel allergénique pour l’ensemble des six espèces. Une comparaison entre espèces a permis d’identifier 16 allergènes putatifs communs, dont la tropomyosine, déjà décrite chez les insectes et les crustacés. Lien
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Dangers biologiques et chimiques
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Étude
Monde, épidémies d’origine alimentaire, culture de la sécurité des aliments
Une revue de la littérature, totalisant plus de 6 600 évènements sanitaires ayant eu lieu entre 2001 et 2022 à travers le monde, s’est intéressée aux pratiques et attitudes des acteurs de la chaîne alimentaire en matière de sécurité sanitaire des aliments qui pourraient expliquer ces incidents. Les fabricants et transformateurs sont les acteurs les plus souvent associés à des défaillances en comparaison des fournisseurs de matières premières ou services de contrôle. Les facteurs les plus fréquemment analysés dans les publications sont des défauts dans les règles et procédures d’hygiène mises en place dans les entreprises, ou des comportements d’hygiène inadaptés, partagés par les équipes opérationnelles. Cependant, la culture d’entreprise en matière de sécurité sanitaire, les normes comportementales ou bien le contexte social et culturel sont rarement discutés, alors que ces facteurs peuvent permettre de comprendre des comportements inadaptés. L’étude recommande une meilleure prise en compte de ces facteurs dans les enquêtes épidémiologiques, afin d’identifier les causes profondes des incidents sanitaires. Lien En Europe, le Règlement 2021/382 introduit l'obligation de mise en place chez les opérateurs d'une culture de la sécurité des aliments. Lien
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Étude
France, arsenic, méthode
L’arsenic (As) peut exister sous plus d’une centaine de formes inorganiques ou organiques, aux propriétés toxiques différentes. Jusqu’à présent, la méthode officielle employée en France pour mesurer l’arsenic inorganique dans les aliments ne permettait pas de quantifier séparément les différentes espèces d’arsenic et ne s’appliquait qu’à quelques familles d’aliments. Le laboratoire de sécurité des aliments de l’Anses a récemment optimisé cette méthode pour étendre son champ d’application. Cette évolution analytique permettra d’améliorer l’évaluation de l’exposition alimentaire à l’arsenic de la population française dans le cadre de la troisième EAT. Lien L’importance de la spéciation de l’arsenic dans les aliments est discutée dans un Point sur. Lien
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Étude
Océan Indien, ciguatoxines, poissons
Les ciguatoxines (CTX), responsables de cas de ciguatera, sont encore peu documentées dans les poissons de l’Océan Indien en raison de difficultés analytiques. Dans une étude à La Réunion, une approche multidisciplinaire a été adoptée pour évaluer la toxicité, la présence de composés de type CTX et les profils de toxines chez quatre spécimens capturés entre 2003 et 2020, appartenant à trois espèces fréquemment impliquées dans des cas de ciguatera (Variola louti, Lutjanus bohar et Carcharinus leucas). Les bioessais ont révélé la présence de composés analogues aux ciguatoxines (CTX) dans toutes les chairs analysées, avec des valeurs de toxicité atteignant jusqu’à 2,69 µg équiv. CTX1B/kg dans la chair de L. bohar, dépassant la valeur guide proposée par la FDA (0,01 µg/kg). Des analyses par spectrométrie de masse en haute résolution ont confirmé la présence de CTX1B, 52-epi-54-deoxyCTX1B, 54-deoxyCTX1B et un analogue du groupe CTX3-C, principalement dans les tissus de V. louti et L. bohar. La comparaison entre les résultats des bioessais et les concentrations mesurées par spectrométrie de masse indiquent qu’ils existent probablement des congénères de CTX non identifiés par les méthodes actuelles. Lien
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Étude
Suède, biotoxines marines, moules
Une étude a été menée de mars à novembre 2022 sur trois fermes de moules (Mytilus edulis) localisées sur la côte est de la Suède pour surveiller la présence des cyanobactéries et dinoflagellés ainsi que leurs toxines. Parmi les 23 espèces de microalgues surveillées, 12 ont été identifiées au moins une fois dans les fermes. Des toxines du groupe des yessotoxines et cyanotoxines (microcystine, cylindrospermopsine, nodularine et saxitoxines) ont été détectées dans les échantillons de moules, à des concentrations inférieures aux valeurs limites réglementaires européennes lorsqu’elles existaient (Règlement (CE) 853/2004 modifié). La nodularine, non réglementée en Europe, a été détectée à des concentrations pouvant atteindre jusqu’à 47 µg/kg, proche de la limite de 51 µg/kg recommandée en Australie. Les concentrations mesurées dans les moules n’étaient pas toujours corrélées à l’abondance des microalgues. Les toxines de dinoflagellés étaient observées au printemps et à l’automne tandis que les toxines de cyanobactéries étaient principalement présentes en été. Les auteurs recommandent une surveillance systématique au moment de la récolte, car aucune période de l’année ne s’est révélée exempte de toxines. Lien
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Étude
Équateur, plomb, épices
Dans une étude menée en Équateur, les concentrations de plomb et chrome de 148 échantillons d’épices et condiments prélevés au stade de la distribution ont été analysées. Des concentrations de plomb supérieures à la TM européenne de 2 mg/kg ont été mesurées dans trois échantillons de cannelle et cumin commercialisés en gros et deux échantillons de poivre et muscade commercialisés au détail, avec des concentrations pouvant atteindre 4 702 mg/kg. Des dépassements ont également été observés dans 38 % (13/34) des sauces ketchup et 23 % (8/35) des sauces barbecue, en lien probablement avec les épices entrant dans leur composition. Les résultats indiquent la présence de chromate de plomb, suggérant une falsification volontaire des produits. Les auteurs pointent des lacunes réglementaires depuis la suppression de normes réglementaires sur les éléments traces métalliques en 2021 dans le pays. Lien Des pratiques frauduleuses avaient déjà été identifiées par la FDA en 2023, au cours d’une enquête sur des cas de plombémie élevée chez des enfants ayant consommé des compotes contenant de la cannelle importée d’Équateur. Lien
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